Journée découverte du 24 avril 2019
Des spiritueux au spirituel ou d’Auvers-sur-Oise à Royaumont
Malgré la fraîcheur du petit matin nous sommes 16 et à l’heure dite sur l’esplanade du palais des congrès attendant le car devant nous conduire à Auvers-sur-Oise et à Royaumont pour une balade allant des spiritueux au spirituel.
A Auvers-sur-Oise notre première étape (la dernière pour Van Gogh), le groupe est renforcé par six amicalistes venus directement. Traversant d’une flèche la cité endormie nous débarquons au petit musée de l’absinthe chère à Vincent mais qui n’abusait point, faute de moyens, contrairement à d’autres impressionnistes absinthés.
Accueillis par la propriétaire et fondatrice du lieu nous commençons par herboriser, du moins en pensée, car la grande armoise ne prospère guère sous nos climats. N’empêche, quelques menues absinthes de complément pousse ça et là dans un mini jardin de curé.
Dans la première salle du musée la grande prêtresse des lieux nous conte l’histoire de la fameuse fée verte depuis la révolution jusqu’à son interdiction en 1915, victime des ligues antialcooliques et de vertu ainsi que du lobbying de Clémenceau. Entre temps elle avait connu son âge d’or au XIX siècle sous la houlette de la famille suisse Pernod qui créa sa première distillerie à Pontarlier. Succès et concurrence aidant la France compta jusqu’à plusieurs centaines d’établissements semblables. Fermés pour la plupart alors que Pernod s’orientait vers la production d’apéritifs anisés, la production ne reprit qu’en… 2011 . Le doux poison étant autorisé à condition d’être petitement et légalement dosé, l’anis étoilé, la menthe et autres plantes aromatiques venant agrémenter le breuvage.
Et pour illustrer le propos, les autres salles montrent d’abondance le matériel dédié : verres à réservoir, cuillères ajourées pour y placer le sucre qui sera dissout au goutte à goutte par des fontaines dotées de petits robinets contribuant ainsi à la convivialité du cérémonial car c’est péché que de boire seul. Peintures, affiches, journaux, gravures de Stein et Daumiers, entre autres, disent tout les bienfaits et méfaits de la petite fée.
Après la théorie, des travaux pratiques sous forme de dégustation, très appréciée, parachèvent cette visite muséale au moment où le soleil pointait pour réchauffer l’ambiance, si besoin était.
De retour dans notre car où flotte une douce ambiance nous filons vers la fameuse abbaye de Royaumont.
Des spiritueux au spirituel il n’y a qu’un pas allègrement franchi. Un spirituel tempéré et laïcisé, l’abbaye, fondée par Louis IX futur et unique saint de la lignée, abritant aujourd’hui une fondation dédiée aux arts de la danse et de la musique.
La majesté du lieu, un pur chef d’œuvre cistercien, se révèle accueillant pour les visiteurs affamés, logés dans un réfectoire pour un déjeuner plus digne des abbés que celui des moinillons et autres convers laïcs au service de la communauté.
Frais et dispos nous suivons une guide locale, savante et gouailleuse, qui nous narre l’histoire de Royaumont depuis sa fondation, son riche développement et son déclin jusqu’à la révolution de 89. Décrété bien national l’abbaye fut vendue à un petit marquis entreprenant qui la transforma en filature de coton, très à la mode à cette époque. L’homme d’affaires ayant échappé au rasoir national de la Terreur sa petite industrie reprit de plus belle. Elle prospéra tant qu’il fit même démolir la vaste et splendide église conventuelle pour construire de nouveaux ateliers.
Aujourd’hui seule une tour pignon indestructible orne encore ce champ de ruines. Plus tard de saintes femmes occupèrent les lieux pour y former de futures religieuses. Bien leur en prit car elles sauvèrent le noble monument jusqu’à ce qu’une riche famille d’industriels – les Gouin - firent de l’abbaye une fondation dédiée aux arts. Quelques descendants de ces mécènes visionnaires occupent encore une partie du couvent.
C’est ainsi que le vent passe sur l’histoire et nous ramène plein de souvenirs au bercail. ( Philippe Thébault )
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